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La méditation : piège ou outil pour prendre soin de soi ?

La méditation est une pratique qui commence à se faire connaître dans notre culture. On a entendu beaucoup de choses à son sujet, parfois contradictoire. Elle peut être une formidable pratique pour prendre soin de nous, mais aussi peut être un moyen détourné de se fuir.

A la base, la méditation est une pratique qui s’enracine dans le bouddhisme. Le bouddhisme est une pratique qui cherche à étudier les causes du malheur et de l’affliction, afin de nous en délivrer. En fonction des pays où le bouddhisme s’est développé, elle a été considérée soit comme une pratique spirituelle, soit comme une religion. En France, deux mouvements du bouddhisme se sont démocratisés. Le bouddhisme Tibétain porté par Mathieu Ricard, et le bouddhisme zen provenant du Vietnam amené par Thich Nhat Hahn en 1972 et démocratisé par le psychiatre Christophe Andrée à travers ces livres et travaux sur la pleine conscience. En Aquitaine, nous avons la chance d’avoir ces deux communautés qui cohabitent. Il y a le mouvement Dhagpo qui représente le courant tibétain et le Village des pruniers qui représente le bouddhisme vietnamien, tous deux situés en Dordogne. Il existe ainsi plusieurs types de méditations. Ici on ne parlera que de la méditation de pleine conscience.

Qu’est-ce que la méditation de pleine conscience ?

La méditation est une pratique nous amenant à être conscient, mais n’a pas d’objectif à proprement dit. Elle peut se porter sur n’importe quel objet, comme notre corps, nos sensations, nos perceptions, nos relations, nos pensées, nos émotions ou des considérations plus abstraite comme la faim dans le monde, les guerres, les causes environnementales, etc, ou bien sans objet en restant ouvert à ce qui apparait de manière spontanée. La pratique nous demande d’être et d’observer sans jugement de valeur, en acceptant ce qu’il vient. Elle nous pousse à faire l’expérience de la différence entre ce que je vis, et ce que je suis. Par exemple, au Village des pruniers pour expliquer cela, il explique que même s’il y a des nuages noirs dans le ciel, il faut se rappeler que derrière, le soleil demeure, ou bien, si on prend conscience de notre profondeur, les vagues en surface seront moins désagréables. Un de leur chant illustre bien cet état d’être :

Je suis chez moi, je suis arrivé
Il n’y a qu’ici et maintenant
Bien solide, vraiment libre
Je prends refuge en moi-même
Je suis chez moi, je suis arrivé
Il n’y a qu’ici et maintenant
Bien solide, vraiment libre
Dans la terre pure je m’établis

La méditation peut être exigeante émotionnellement en nous invitant à accepter inconditionnellement ce qui est à l’extérieur et ce qui émerge de nous-même. Elle nous amène à nous interroger sur nos comportements et nos pensées qui nourrissent nos états mentaux générant de la souffrance, chez nous-même mais aussi chez autrui.

Les différentes pratiques

Il existe deux pratiques de la méditation. La méditation formelle et informelle.

La première consiste à orienter notre attention sur un objet  de manière non-jugeante tout en restant immobile dans le silence pendant une durée limitée. Pendant cette durée, nous pouvons profiter de ce temps pour nous explorer intérieurement et revenir à nous même. Cela peut être un moment apaisant où l’on peut prendre refuge, ou bien un moment de découverte et de confrontation avec des parties de nous que l’on n’a pas encore conscientisées. On peut aussi se servir de ce moment comme un moyen pour prendre du recul et pour observer différemment nos relations. En prenant conscience de nos réactions mentales et émotionnelles face à notre passé et nos relations, nous pouvons tenter de comprendre de manière inédite ce qu’il s’est joué réellement.

La méditation informelle quant à elle consiste à développer cette pratique dans la vie de tous les jours. En nous brossant les dents, en attendant le bus, en préparant le déjeuner ; tout peut être objet de pleine conscience. Nous pouvons par exemple profiter de notre marche vers notre travail pour nous accorder un moment de conscience vis-à-vis de nous. On peut prendre conscience à ce moment-là que l’on est peut-être tendu, stressé, ou au contraire enjoué par quelque chose auquel on n’a pas prêté attention. Cette pratique peut s’inscrire aisément dans notre vie quotidienne si tenté l’on y accorde suffisamment de rigueur pour pratiquer un peu tous les jours.

Grâce à la pratique de la méditation, nous nous entrainons à devenir plus conscient de nous-même, c’est-à-dire nos pensées et nos émotions, à défusionner avec notre expérience, à améliorer notre flexibilité mentale, et à être plus ancré dans le moment présent. La méditation nous invite à observer les chemins qu’emprunte notre pensée et notre attention. Lorsque celles-ci s’égarent, elle nous invite à revenir au présent, différent des ruminations du passé et des appréhensions du futur. Elle nous permet d’utiliser la pleine conscience pour prendre soin des états mentaux à l’origine de la souffrance.

Pour imager cela, nous pouvons imaginer de nos états mentaux (cognitifs et affectifs) sont un véritable écosystème, un peu comme un jardin. Il y a de nombreuses graines plantées dans ce jardin qui sont héritées de notre histoire. Certaines graines ont été nourries par nos interactions avec notre environnement, et sont devenues des plantes prenant beaucoup de place, d’autres sont restées à l’état de graine. La pratique permet de prendre conscience de ce que l’on va arroser et nourrir dans notre jardin intérieur. Elle nous permet aussi de développer la graine de la pleine-conscience qui va croître et pouvoir prendre soin des autres graines. 

Mais une question demeure et me semble incontournable à poser. Est-ce que le fait de devenir plus conscient et ancré dans le présent est la conséquence d’un entrainement de notre attention et notre conscience, ou le fruit de la libération spontanée de nos états mentaux générant de l’affliction ?

Le psychologue Charles Whitfield en 2003, a mis en avant une tendance d’éviter par une pratique spirituelle, telle que la méditation, des problématiques émotionnelles non résolues. Il a nommé cela le contournement spirituel. Cela consiste à se refuser de vivre et de se confronter à ses émotions désagréables en utilisant la pratique comme un moyen de fuir. Par exemple, il est possible de se cacher à soi-même notre réalité intérieure en recherchant à atteindre un vécu de calme et sérénité, ou en voulant correspondre à une attitude bienveillante envers les autres, occultant ainsi ce que l’on vit réellement.

En conclusion, la méditation permet d’améliorer nos capacités d’intégrations vis-à-vis de notre réalité intérieure, tout en nous permettant d’accroitre notre ancrage dans le moment présent. Paradoxalement, la méditation nous enseigne que pour être dans le moment présent, il faut aussi accepter que notre histoire s’entremêle dans celui-ci sans pour autant s’y identifier.

Pour aller plus loin

Je vous recommande cette petite vidéo faite par un autre psychologue sur la chaine PsykoCouac

Hugo Ledoux
Psychologue clinicien et
psychothérapeute à Mériganc
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