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10 conseils  pour être vraiment malheureux

Une idée, pour peu qu’on s’y accroche avec une conviction suffisante, qu’on la caresse et la berce avec soin, finira par produire sa propre réalité.

Paul Watzlawick

Faites vous-même votre malheur

Avec soi-même

Soyez heureux

Et surtout, soyez heureux. Montrez votre plus beau sourire aux gens. Vous ne devez surtout pas exprimer votre fatigue, votre mal-être, vos difficultés, vos doutes. Soyez heureux et ne soyez que cela. Avec des amis, en famille, et même dans l’intimité, efforcez-vous d’être le plus heureux possible. Ce n’est pas si compliqué que ça quand même. Rappelez-vous sans cesse que vous avez toutes les bonnes raisons possibles pour être heureux. Le confort matériel, la possibilité de partir en vacances, des relations proches, des parents dévoués. Et si jamais vous n’y arrivez pas, c’est sûrement de votre faute. Regardez autour de vous comme les gens sont heureux. Il suffit de sourire et d’être de bonne humeur. Il est important de se rappeler cela pour être le plus malheureux possible.

Réserver son bonheur pour plus tard

Cette stratégie est assez répandue parmi les pratiquants du malheur chronique. Elle peut être résumé en une ligne : l’important ce n’est pas le chemin mais la destination. Pour appliquer cette stratégie et arriver à augmenter votre niveau de malheur, vous devrez impérativement garder à l’esprit que le bonheur est cette chose qui s’obtient, et qui se gagne en réalisant des objectifs souvent lointains et inaccessibles. Par exemple vous pouvez vous dire « Je pourrais enfin profiter de la vie quand j’aurai mon diplôme », ou encore « je pourrais vraiment être heureux lorsque je serai en couple », ou tout aussi bien « je pourrais vraiment apprécier la vie lorsque j’avais quitté mon travail ». En nous efforçant d’atteindre l’inaccessible, nous rendons impossible ce qui serait réalisable.

Quatre façons de jouer avec le passé

  1. Vous devrez glorifier votre passé de sorte à le voir comme un réservoir inépuisable de larmoyante nostalgie. Que ça soit la jeunesse, une vieille histoire d’amour, ou une relation sans avenir. Souvenez vous uniquement de ce qu’il y a eu de beau et d’agréable dans celui-ci. Ne prêtez surtout pas attention à vos peines, vos douleurs et votre corps qui peut s’activer lorsque vous repensez à votre histoire, car vous devez vous convaincre que vous avez eu une enfance heureuse et des relations satisfaisante.
  2. Une autre technique consiste à se focaliser sur votre passé pour éviter de le remettre en question à la lumière du présent. C’est seulement en portant votre attention sur votre passé, que vous serez assuré d’échapper à des changements de perspective involontaires et occasionnels permettant de découvrir que le présent ne recèle pas seulement des possibilités de malheur, mais aussi de non-malheurs, pour ne rien dire des possibilités absolument nouvelles.
  3. Vous pouvez aussi vous persuader que vous êtes d’inexorables victimes de votre passé, et que définitivement, vous ne pouvez rien y faire. Il est important de veiller à entretenir vos vieilles blessures, vos remords et traumatismes, si possible pensez y autant que possible et si vous n’y arrivez pas, mettez vous dans des situations qui vous le rappelleront. Mais surtout, si par malheur vous veniez à rencontrer des événements qui compensent les privations et frustrations du passé, il sera important, voire même crucial de ne pas se laisser démonter, et de se refuser à cette expérience, et de faire comme le dit la célèbre formule : « trop tard ! Je n’en ai plus envie maintenant ».
  4. Il faudra continuer à mettre en place les mêmes solutions, et les mêmes comportements que ceux que vous avez mis en place dans le passé. Si cela ne marche pas, il faudra persévérer encore et encore, jusqu’à atteindre le résultat désiré, même s’il tarde à arriver. Il faudra surtout faire toujours plus de la même chose.

Éviter le danger et l’inconnu

Il s’agit de refuser catégoriquement de s’exposer à tous les dangers et de détourner votre attention des anomalies qui traversent votre conscience. Que cela soit le saut en parachute, prendre l’avion, aller à une soirée, rencontrer des gens, prendre l’ascenseur, d’avoir une discussion importante avec votre partenaire ou de s’exposer à vos émotions négatives, vous devrez vous abstenir de faire tout cela, et de restez chez vous. Une fois chez vous, pensez aux dangers qui vous entourent : les virus sur les poignées de porte, les couteaux mal rangés, la porte d’entrée qui n’est peut-être pas correctement fermée, le gaz qui est peut-être toujours allumé. La liste est longue et seuls les plus doués d’entre vous pourront la faire grandir. Une fois que vous serez vraiment en sécurité, une fois que tous ces dangers auront été évités, vous aurez la preuve inéluctable que cet évitement a été utile. Votre tâche sera d’entretenir cet évitement et surtout, de continuer d’être d’une fidélité infaillible à vous-même et à vos croyances.

Vous devrez également tâcher d’ignorer tout ce qu’il se trame en dehors de ce qu’il vous semble « normal » dans votre vie. Ignorez ce comportement de votre ami qui vous agace, et surtout ne lui en parlez pas. Ignorez ces regards absents de votre femme qui rentre du travail. Ignorez ces tensions physiques, ces boules à la gorges, ces nœuds à l’estomac qui vous envahissent lorsque vous vous apprêtez d’aller au travail. La stratégie de l’autruche est très efficace pour envenimer ces situations.

Être d’une fidélité sans faille à soi-même

Pour commencer à être malheureux, il est nécessaire de considérer qu’il n’existe qu’un seul point de vue valide, le vôtre. Vous devez faire en sorte de vous accrocher à vos croyances et vos représentations sur le monde et surtout sur vous même. N’acceptez surtout pas de remettre en question votre point de vue, et encore moins, n’acceptez aucun compromis dans vos relations, car rappelez vous, vous avez raison. Vous devrez préférer le monde tel qu’il devrait être, plutôt que de l’accepter tel qu’il est. Si quelqu’un vous dit que vous vous trompez, ou pire si vous en avez l’intuition, refusez d’y prêter attention car vous avez raison.

Et avec les autres

Je te l’avais bien dit

Il est important de garder à l’esprit que les autres sont responsables de ce qui vous arrive. Vous devez toujours considérer que vos réactions, vos pensées et vos émotions sont l’unique résultante du comportement des autres. Vous n’êtes en rien responsable de leurs comportements et leurs réactions. Si votre conjoint ou votre parent vous accuse de quelque chose, cela doit être évident pour vous que si vous vous êtes comporté de la sorte, c’est avant tout parce qu’il ou elle a fait quelque chose au préalable. Vous aurez ainsi la preuve absolue que les autres réagissent bien comme vous l’aviez prédit et comme vous le pensiez. La prédiction d’un événement a pour résultat de faire arriver ce qu’elle a prédit.

Trouver le bon partenaire de jeu

Pour entretenir son malheur il s’agira de trouver le partenaire qui acceptera de son plein gré de jouer au même jeu que nous. Pour ceux qui ont peur d’être abandonnés, il vous faudra trouver quelqu’un de fuyant ; pour ceux qui aiment trop, trouver quelqu’un qui a peur de l’engagement ; pour celui qui a un penchant pour l’autodestruction, trouvez un sauveur ; etc. Une fois que vous l’aurez trouvé, vous pourrez enfin rejouer perpétuellement le même supplice , jusqu’à trouver un autre partenaire avec qui rejouer à ce jeu.

Une histoire de chemise

Une autre manière d’être malheureux dans vos relations est de manipuler la communication. Cette méthode consiste à offrir à son interlocuteur une alternative illusoire entre deux possibilités. Dès qu’il en choisit une, on peut lui reprocher de ne pas avoir choisi l’autre. Par exemple, offrez deux chemises à votre conjoint, une rouge et une bleue. La première fois qu’il en portera une, dites-lui avec étonnement « je savais bien que tu n’aimerais pas l’autre ». Ce principe peut s’appliquer pour tout un tas de sujets de la vie quotidienne : le choix du film à la télévision, la femme qui demande à son mari si il apprécie son plat, l’adolescent qui exige que leurs parents les traitent en adultes, tout en restant en refusant d’en endosser des responsabilités, parce qu’ils sont trop jeunes pour y songer. Si ce n’est déjà pas le cas, avec un peu de pratique, vous deviendrez expert dans cette stratégie.

Voici deux exercices simples pour s’exercer :

  1. Demander un petit service à quelqu’un. Lui en demander un autre dès qu’il se met au travail sur le premier. Ne pouvant satisfaire les deux requêtes, il se retrouve désormais piégé. S’il fait mine de poursuivre la première, plaignez-vous qu’il ignore la seconde, et vice versa
  2. Dire ou faire quelque chose que l’autre peut aussi bien interpréter comme un trait d’humour ou prendre au pied de la lettre. Selon l’attitude qu’il adopte, lui reprocher de ne pas prendre au sérieux un sujet important, ou de manquer de sens de l’humour.

Une question d’estime

Pour être malheureux dans ses relations, il est important de se convaincre que l’on ne mérite pas d’être aimé (ou à choisir désiré, accepté, pris en compte, soutenu), et que, si par malheur une personne venait à nous aimer, cela serait forcément le signe d’un amour mal placé de son côté, voire même, d’un calcul égoïste. En effet on ne peut aimer son prochain que si l’on commence par s’aimer soi-même. Ainsi, si je ne m’estime pas, et qu’une personne tend à m’aimer, c’est que cette personne n’est pas estimable. À l’inverse, si je rencontre une personne qui ne m’estime pas, je la trouverai forcément digne d’intérêt. Une fois bien installé dans cet enfer, le reste de la facile : il suffit de s’éprendre d’une personne mariée, de quelqu’un d’inaccessible à la relation, d’une personne infidèle, etc. De cette manière on s’épargnera la découverte troublante du fait qu’une personne libre pourrait parfaitement envisager d’entrer dans une relation avec nous, ce qui la rendrait aussitôt méprisable.

L’art de la pensée négative

Mais l’art d’être malheureux passe avant tout par le développement de votre capacité à voir à moitié vide plutôt qu’à moitié plein. Pour bien être malheureux, il est de votre devoir de passer plusieurs heures par jour à repenser, à ressasser, à ruminer  aux vieilles histoires, à vos relations présentes, aux événements désagréables de votre vie, et de vous convaincre avec la plus grande attention que ces événements au fond n’ont qu’un seul et unique but, rendre votre vie un enfer.

Pour réussir cela je vous propose plusieurs exercices :

D’abord, confortablement installé sur votre siège, vous allez fermer les yeux et imaginer que vous mordez un citron bien juteux. Vous allez exercer votre attention jusqu’à ce que ce citron imaginaire vous fasse venir l’eau à la bouche.

Une fois cet exercice réalisé, toujours assis sur votre siège, vous allez passer de la pensée du citron, à une pensée sur un objet de votre quotidien : votre téléphone, votre voiture, vos chaussures, votre télévision. Lorsque vous aurez trouvé cet objet, portez votre attention sur le fait que finalement cet objet n’est pas aussi efficace, confortable, appréciable qu’il ne l’est vraiment. Même si vous croyez posséder à cet instant quelque chose de parfait, prenez conscience de ses innombrables défauts et qu’il y a forcément mieux ailleurs. Focalisez-vous sur ses défauts puis répéter l’exercice ce que ses défauts se transforment en quelque chose d’insupportable. Changer cet objet pour un autre de meilleure qualité, et réitérer l’opération

De la même manière, en regardant le ciel par la fenêtre, vous verrez apparaître dans votre champ visuel une myriade de cercles minuscules semblables à des bulles. Cela est sans nul doute le signe encore une fois que, comme à votre habitude, votre santé vous fait défaut. C’est forcément le signe d’une affection oculaire sournoise. Et, même si l’ophtalmologiste vous dit que c’est un phénomène normal qui se nomme phosphène, vous devrez vous convaincre que ce spécialiste ne souhaite pas désespérer un patient en lui révélant le caractère incurable de sa maladie. Vous pouvez appliquer la même logique a tous les phénomènes corporels un peu curieux. Le truc est de se convaincre avec la plus grande force que notre santé nous fait défaut, et que rien ni personne ne pourra dire le contraire.

Une fois que vous serez suffisamment entraîné à la pratique de ces exercices corporels, vous passerez votre attention sur le monde extérieur. Par exemple pouvez commencer par les feux réglant la circulation. Vous avez déjà remarqué leur tendance à demeurer au vert tant qu’on est éloigné, pour passer à l’orange puis rouge à l’instant même où l’on s’en approche. Si vous parvenez avec brio à résister à la voix de la raison qui souffle que en moyenne on doit rencontrer à peu près autant de feu verts que de rouges, vous êtes sur la bonne voie. Ainsi, les feux rouges prendront beaucoup de place dans votre esprit, tandis que les feux verts cesseront de vous impressionner. Vous pourriez même vous mettre à soupçonner qu’il y a des pouvoirs inconnus qui influencent la circulation des feux, et qui vous poursuivent en tous lieux, que cela soit à Bordeaux, à Toulouse, ou à Paris, voire même à l‘international. Puis vous finirez par découvrir que c’est toujours votre fil d’attente au supermarché ou à l’aéroport qui avance la plus lentement, ou que c’est toujours votre train qui est retardé.

Maintenant que vous êtes désormais conscient des hasards dignes d’éveiller vos soupçons, qui existent entre des événements d’apparence banale, le moment est venu de faire attention à ces relations menaçantes qui tissent un réseau remarquable entre des faits qui vous échappent totalement. Maintenant convaincu que vous êtes poursuivis par la malchance et le malheur, et que vous entretenez correctement vos ruminations, vous pouvez vous mettre à suspecter que les gens autour de vous cherchent d’une façon ou d’une autre à vous nuire. Par exemple, lorsque votre compagnon ou votre compagne est en retard de plus de 15 minutes, c’est forcément le signe qu’il se trame quelque chose, qu’il ou elle ne vous respecte pas, ou pire vous trompe avec quelqu’un. Lorsque les gens vous regardent dans la rue, c’est forcément le signe qu’ils vous jugent ou se moquent de vous en secret.

Enfin, le dernier exercice pour entretenir vos ruminations de sorte à être vraiment malheureux consiste à parler aux personnes concernées de vos certitudes qu’il se trame quelque chose de suspect. Même si votre interlocuteur tente de vous convaincre que ces soupçons sont mal fondés et qu’il ne se passe rien du tout, il sera décisif de vous rappeler que toute personne désireuse de nuire ne s’amusera jamais à le reconnaître ouvertement. Bien au contraire, elle cherchera dans son hypocrisie à détourner l’attention de sa victime des soupçons que celle-ci avait pu former en les déclarant infondés et en multipliant les protestations d’amitié et de bonne volonté.

 

Hugo Ledoux – Psychologue et Psychothérapeute à Merignac et en ligne

 

 

 

Tout est bien… Tout. L’homme est malheureux parce qu’il ne sait pas qu’il est heureux. Ce n’est que cela. C’est tout, c’est tout ! Quand on le découvre, on devient heureux aussitôt, à l’instant même.

Dostoïevski

Les possédés